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Notre recherche visait au départ l'analyse de la substance du dommage moral: retrouver les sentiments à l'intérieur des chefs de dommage moral. Une première lecture des jugements québécois publiés, rendus entre le 1er janvier 1950 et le 31 décembre 2008 et à l'intérieur desquels des dommages et intérêts ont été octroyés pour réparer un dommage moral en matière de responsabilité civile extracontractuelle, laisse une impression de confusion et de désordre, tant au plan terminologique qu'au plan conceptuel. Dommage moral, préjudice extrapatrimonial, dommage non pécuniaire, préjudice moral: autant de termes qui rendent impossible une synthèse des chefs de préjudice. C'est finalement à l'analyse des raisons de cette confusion, aux formes qu'elle prend, aux moyens déployés par les juristes pour, sinon la surmonter, du moins la contenir, que la présente thèse est consacrée. Malgré cette confusion et ce désordre, un constat général d'homogénéité et de stabilité des discours judiciaire et juridique sur le préjudice extrapatrimonial peut d'abord être tracé. Le dommage moral et le préjudice extrapatrimonial (les deux étant couramment assimilés) sont réputés difficilement réparables. Afin de contenir l'arbitraire et la subjectivité qui caractérisent le préjudice extrapatrimonial, un discours dominant rationnel et raisonnable s'est construit et une évaluation globale du préjudice est pratiquée par les juges. Il en résulte une stabilité des montants des dommages et intérêts octroyés à titre de réparation. Mais pourquoi autant de mots pour décrire une même réalité? Dommage et préjudice sont actuellement employés en droit québécois comme s'ils étaient terminologiquement et conceptuellement indistincts; il en résulte une sursimplification de la responsabilité civile. Nous proposons que le dommage (qu'il soit corporel, matériel ou moral) et le préjudice (qu'il soit extrapatrimonial ou patrimonial) sont distincts. Le dommage se qualifie au siège de l'atteinte (des corps, des choses, des sentiments et valeurs) et le préjudice se qualifie au regard de la nature des répercussions du dommage (répercussions patrimoniales ou extrapatrimoniales). Ainsi distingués, dommage et préjudice retrouvent un sens tout en faisant ressortir les deux temps composant la responsabilité civile: l'établissement d'une responsabilité à l'aide de la faute, du dommage et du lien de causalité les unissant (1er temps) et la réparation du préjudice accompagnant le dommage (2e temps). Par une telle distinction, la sursimplification de la responsabilité civile est dépassée et force est de constater que bien peu de choses sont dites dans les jugements sur la substance du dommage moral et même sur le dommage moral tout court. Le discours dominant porte essentiellement sur la difficile détermination de la quotité des dommages et intérêts pour réparer le préjudice extrapatrimonial. Si le dommage moral et le préjudice extrapatrimonial n'étaient pas confondus et employés par les juristes avec une apparente cohérence, une synthèse des chefs de préjudice extrapatrimonial, telle qu'envisagée au départ, aurait peut-être été possible...
Dans le silence de la loi, la réparation du préjudice prend, le plus souvent, la forme d'une réparation pécuniaire. Pourtant, la jurisprudence accepte depuis longtemps d'ordonner la réparation en nature. La doctrine encourage fortement cette orientation et en déduit parfois sa prééminence, voyant dans ce procédé l'émanation de la restitutio in integrum qui fonde le droit de la responsabilité civile. Or, ce postulat est nuancé à l'aune d'une étude approfondie de la notion de réparation en nature et de sa mise en œuvre. Positivement perçue comme une notion compréhensive, la réparation en nature attire à elle d'autres sanctions en nature voisines mais d'une essence juridique différente, telles que l'exécution forcée et la cessation de l'illicite, avec lesquelles elle est le plus souvent confondue. Aussi, une définition stricte et claire de la réparation en nature, mise en exergue par un travail de distinction, doit permettre de cerner son contenu propre. L'étude de la réparation en nature conduit, ensuite, à dégager les conditions présidant à son prononcé, tant en termes de possibilité que d'opportunité. Elle mène également à confronter la teneur du pouvoir du juge au regard de ce même prononcé, lorsque sa souveraineté se heurte à l'intérêt prépondérant de la victime ou à un certain type de dommage tel que le dommage écologique.